Renforcer la souveraineté alimentaire au Sénégal grâce aux céréales locales

Au Sénégal, près de 50 % des céréales consommées, principalement du blé et du riz, sont importées. Cette dépendance économique et alimentaire s’est profondément ancrée dans les habitudes des ménages, au point que 90 % des importations de blé servent à produire la farine utilisée pour faire du pain, un aliment de base dont la consommation ne cesse de croître. Mais cette situation pèse lourdement sur les opportunités d’emplois et de revenus pour les agriculteurs, les agricultrices et les acteurs locaux de la transformation alimentaire.

Ainsi, les boulangers et transformatrices souffrent de la volatilité des prix mondiaux du blé. Beaucoup voient leur activité compromise face à l’explosion des coûts. En réponse, les boulangeries urbaines diminuent le poids du pain, une pratique qui accentue les menaces nutritionnelles dans tout le pays.

Soutenir un modèle durable de la filière mil-maïs

Depuis 2011 SOL, membre du CFSI, et la Fédération des Organisations Non Gouvernementales du Sénégal (Fongs) collaborent pour créer un modèle durable de filière mil-maïs. Leur objectif est de favoriser la production locale et la qualité nutritionnelle des aliments.

En structurant la filière autour de 4 minoteries, ce projet a formé et équipé plus de 270 producteurs, ainsi que 400 artisans boulangers et femmes transformatrices répartis dans 80 villages du bassin arachidier. Plus de 42 000 consommateurs accèdent désormais à des produits locaux de qualité, un succès salué pour ses apports socio-économiques et nutritionnels.

Des défis à surmonter pour pérenniser la filière

Malgré ces avancées, la rentabilité économique et le soutien politico institutionnel demeurent des enjeux cruciaux. La hausse des coûts des céréales, la concurrence du blé importé et des capacités organisationnelles encore fragiles freinent la progression. À cela s’ajoute un besoin de reconnaissance institutionnelle pour faciliter l’accès à des marchés formels et publics.

Pour répondre à ces défis, la troisième phase du projet, entamée en 2023, a introduit des innovations majeures :

• renforcement entrepreneurial : une coach accompagne les comités de gestion des minoteries, forme les acteurs locaux et soutient la formalisation juridique des structures en sociétés coopératives interprofessionnelles ;
• promotion des produits : des campagnes sur des radios communautaires, des séances de dégustation et une « journée nationale des céréales locales » mobilisent les consommateurs autour du consommer local ;
• réseautage et mutualisation : la mise en réseau des transformatrices et des boulangers facilite les achats groupés et optimise la logistique ;
• formation en agroécologie : 270 exploitations familiales ont bénéficié d’accompagnements dédiés pour augmenter leurs rendements et la qualité de leur production.

Résultats encourageants et perspectives

Les efforts en agroécologie ont transformé les pratiques agricoles :

• 99 % des producteurs appliquent au moins 3 techniques agroécologiques, permettant une réduction moyenne de 66 % d’intrants chimiques pour le mil ;
• les rendements agricoles ont augmenté de 35 % pour le mil et de 48 % pour le maïs.

Côté revenus, les femmes transformatrices ont vu leurs gains quotidiens grimper de 54 % en moyenne, et les volumes de ventes des minoteries ont atteint 10 081 tonnes sur six mois en 2024, soit presque autant que sur toute l’année précédente.

Et demain ?

Pour relever les défis alimentaires et économiques du Sénégal, un soutien accru aux filières locales est indispensable. Promouvoir la souveraineté alimentaire, c’est permettre aux populations rurales de vivre dignement de leur travail tout en garantissant à l’ensemble du pays un accès à des produits locaux de qualité.

Il est impératif de continuer à :

• intensifier le soutien public et institutionnel ;
• mobiliser les consommateurs pour faire des céréales locales un choix privilégié ;
• renforcer les capacités des acteurs de terrain.

Ensemble, engageons nous pour un avenir alimentaire durable et solidaire.

Cette initiative s’inscrit dans le programme Promotion de l’agriculture familiale en Afrique de l’Ouest qui soutient chaque année près de 80 initiatives. Vous pouvez participer au développement de ces initiatives en faveur du consommer local. Faites un don.