Les éleveurs font partie des populations les plus pauvres d’Afrique de l’Ouest. Le développement de la filière lait local est essentiel pour améliorer leurs conditions de vie, c’est pourquoi les producteurs multiplient les initiatives (création de centres de collecte, de mini-laiteries pour transformer le lait…), certaines étant appuyées par le CFSI.
Mais le faible soutien des États ouest-africains et la concurrence des importations, en particulier celles d’un « faux lait » européen réengraissé avec de l’huile de palme, nuisent gravement à ces efforts. Au Sénégal, les transformateurs achètent le litre de lait local entre 250 et 600 FCFA selon le lieu et la saison alors que le mélange d’huile de palme et de lait écrémé en poudre coûte moins de 200 FCFA.
Or, dans le cadre de la négociation d’un Accord de partenariat économique, l’Union européenne (UE) fait pression pour la suppression des droits de douane ouest-africains sur les importations de lait en poudre européen. Par ailleurs, grâce aux subventions de la Politique agricole commune (Pac), le lait européen est exporté en dessous de ses coûts de production, ce qui constitue une concurrence déloyale pour les producteurs ouest-africains. A l’occasion des réformes actuelles de la Pac et du partenariat entre l’UE et – notamment – l’Afrique de l’Ouest, le CFSI plaide pour que les politiques européennes respectent le principe de souveraineté alimentaire, c’est-à-dire le droit pour l’Afrique de l’Ouest de protéger et développer son agriculture ainsi que son élevage.
Si la production de lait local dispose d’un fort potentiel de développement, elle ne pourra pas, dans la plupart des pays, satisfaire à moyen terme la totalité des besoins des consommateurs du fait de la croissance démographique. La complémentarité avec les importations doit donc être discutée et encadrée. C’est pourquoi, le CFSI a organisé une première rencontre au Cniel (Centre national interprofessionnel de l’économie laitière) le 13 novembre 2018 pour présenter les potentiels et les contraintes de la filière lait local en Afrique de l’Ouest
Cette demi-journée fut l’occasion d’ouvrir un dialogue sur les moyens de combiner la double nécessité de soutenir le développement de la filière lait local et de compléter cette production par des importations pour satisfaire les besoins des consommateurs ouest-africains. Cela devrait passer par une hausse des droits de douane sur les importations, une baisse de la TVA sur le lait cru, une obligation pour les industriels de développer des achats de lait local, l’adoption d’une règlementation plus stricte permettant de distinguer clairement le lait des mélanges réengraissés avec de l’huile de palme, une politique agricole ouest africaine soutenant la filière lait local… Un dialogue qui ne demande qu’à se poursuivre pour déboucher sur des actions concrètes afin de faire reculer la pauvreté des éleveurs en Afrique de l’Ouest.
Dans ce but, le CFSI organisera le 26 février 2019, un débat sur le thème : « les politiques commerciales ouest-africaines, freins ou leviers pour le développement de la filière lait local en Afrique de l’Ouest ».